Discours d'Hervé Morin au Congrès du Parti Radical

Publié le par nouveaucentre11

 

Chers amis,


Merci à tous de votre invitation en ce moment si important de la vie de votre parti et de nos familles politiques.
Vous le savez, samedi dernier à Versailles,  en présence de Jean-Louis, nous avons décidé avec le Nouveau Centre d’emprunter un  chemin identique au votre. 
Et c’est un joli clin d’œil d’ailleurs la rencontre de nos deux parti :
- le plus vieux des partis et le plus jeune des partis ;
- le vôtre, plus que centenaire, chargé d’histoire, un parti presque consubstantiel à la République. Ce parti Radical toujours protégé par ses grands aînés Gambetta, Clemenceau, Edouard Herriot. Un parti toujours en charge de protéger leur héritage, la laïcité, les droits de l'Homme, l'égalité des chances.
- Rencontre donc entre vous et nous, le Nouveau Centre, encore tout récent, forcément moins connu mais avec des fondations désormais solides, avec son groupe parlementaire, ses 2 000 élus locaux et ses 17 000 militants.
On annonçait dans tous les milieux autorisés, dans tous les couloirs, dans toute la presse, que votre décision serait difficile parce qu’il fallait quitter le navire-amiral, l’UMP.
A la difficulté, vous avez répondu par le courage de l’indépendance.
A l’emprise des liens partisans, vous avez répondu par la volonté de l’expression d’une alternative politique.
A la protection tutélaire, vous avez répondu par l’émancipation et la maîtrise de votre destin.
Je sais très bien ce que cela représente ; ce n’est pas une petite décision, ni une mince affaire. Et je veux, du fond du cœur, la saluer.
Chapeau bas Jean-Louis !
Chapeau bas Mesdames et Messieurs du Parti Radical ! Chapeau bas pour une décision difficile prise à 93 %.
Je peux d’autant plus le dire que pour le Nouveau Centre, aussi, cela n’a pas été une décision aussi simple à prendre.
- Nous aspirions au rassemblement mais nous étions heureux entre nous ;
- Nous voulions porter une alternative et donc être plus forts, mais nous craignions la dilution ;
- Nous cherchions à déverrouiller les portes mais nous voulions garder la clé de la maison.
 Et ce n’était pas si facile car notre histoire est courte mais elle est celle d’un combat. Ou plus exactement d’un déchirement et d’un combat.
Le déchirement, vous le savez tous c’est le divorce du printemps 2007 avec François Bayrou. Un divorce douloureux pour nous tous.
La loyauté de dizaines de compagnons de route – d’une route qui était loin d’être un boulevard quand à un an de la présidentielle nous étions à 3% dans les sondages –  et que l’on a ensuite présenté comme une trahison, nous qui avons toujours assumé notre alliance à droite.
La loyauté de dizaines de compagnons de route mais aussi l’énergie de milliers de militants, la confiance de millions d’électeurs, tout cela sabordé en quelques jours au nom d’une ambition personnelle sans équivalent.
Nous l’avons vécu comme un immense gâchis : gâchis humain et gâchis politique.
Pensez-vous que le quinquennat aujourd’hui si diversement apprécié par les Français aurait eu la même physionomie si l’histoire politique s’était écrite autrement  et si notre majorité avait pu marcher sur deux jambes. 
Je suis aujourd’hui convaincu que NON.
- Est-ce qu’une vraie coalition aurait accepté le bouclier fiscal tel qu’il a été conçu ?
- Est-ce qu’une vraie coalition aurait toléré le discours entre la France de la diversité et l’accroissement de la délinquance ?
- Est-ce qu’une vraie coalition n’aurait pas été plus ambitieuse en matière d’éducation car mes chers amis, un pays qui accepte dans une complicité coupable et suicidaire que 20% de nos enfants à la sortie du CM2 sont en situation d’illettrisme est un qui court de graves dangers et qui créé toutes les conditions de ses difficultés de demain : le chômage, l’exclusion, la précarité, la délinquance.
- Est-ce qu’une vraie coalition n’aurait pas été plus ambitieuse en matière de financement de la protection sociale pour améliorer le pouvoir d’achat des salariés ; et je continue à dire que la TVA sociale est le seul moyen de réduire massivement les cotisations pesant sur les salaires et que les Chinois et les Indiens doivent financer notre sécurité sociale au moment où les Français achètent leurs produits.
Sincèrement, je crois que les choses se seraient passées différemment et que le Président de la République lui-même y aurait gagné s’il avait pu disposer d’une coalition certes loyale mais exigeante sur les principes et sur la conduite du pouvoir.
Oui, notre impuissance à peser suffisamment sur les choix nous a coûté cher mais elle a coûté cher à toute la majorité et cela, je le dis à l’UMP qui redoute notre démarche : les Français n’oublieront pas cela au moment de la présidentielle. Ils voudront une majorité plus équilibrée, avec des garde-fous. Des garde-fous non pas pour empêcher mais pour agir mieux.
En 2007, au Nouveau Centre, nous avons fait le choix de ne pas nous fondre dans l’UMP dont nous avions combattu non pas les hommes mais le principe même depuis des années.
En 2007, nous avons fait le choix de reconstruire brique après brique la maison centriste.
Et ce chemin que nous avons choisi en 2007, nous ne le regrettons pas aujourd’hui ! Non seulement par ce que cela a été une belle aventure humaine mais surtout, nous ne le regrettons pas aujourd’hui car vous êtes là. Car nous sommes ensemble, enfin retrouvés !
Je vous le dis, c’est notre plus belle récompense, et merci de nous l’avoir donnée. Nous sommes à nouveau ensemble. Et ensemble dans une maison plus grande avec la Gauche moderne, la Convention démocrate, des écologistes et pourquoi pas demain des libéraux et des Gaullistes.
 Ce que je veux avec cette confédération,  c’est qu’elle soit d’abord une histoire d’amitiés et de confiance, une histoire de projets et d’idées, une histoire de batailles et de combats électoraux que nous mènerons ensemble.
Une bande d’amis donnant de l’oxygène à la vie politique française ; une bande de potes qui redonne de la gaîté à un pays sur lequel pèse une telle chape de plomb.
Une équipe qui aime les gens comme je sais que nous les aimons ; qui ne promet pas la lune, qui ne prend pas les Français pour des zozos par des tartines de démagogie mais qui les considère comme des citoyens responsables.
Une équipe qui porte une espérance à partir d’un projet. Un projet réaliste. Un projet qui rassemble. Un projet qui respecte les Français. Ces Français dont j’entends chaque jour lors de mon Tour de France la demande incessante de reconnaissance et de considération.
Mes Chers amis,
Je disais à Jean-Louis samedi dernier qu’on ne s’était pas beaucoup parlé depuis 2002. Qu’on ne s’était pas toujours adressé des amabilités ; que le chemin de la confiance n’était pas si naturel que cela entre nous.
Et bien je vous propose que nous effacions tout cela. Et regardons ce qui nous réunit.
Faisons nous confiance et surtout n’ayons pas peur.
Les journalistes nous disent : mais si vous dérangez trop, vous risquez de perdre votre circonscription. Mais c’est pourtant le contraire !
La candidature de chacun d’entre nous n’est légitime que si elle est l’expression d’une famille politique reconnue par le suffrage universel. Le seul risque quand vous êtes élu, c’est de ne devoir votre circonscription qu’au seul fait du prince. Si nous représentons un courant de pensée, une famille politique reconnue comme telle par les Français, alors nous ne craignons rien.
Et vous le sentez, j’en suis sûr, il y a une vraie attente des gens à ce que nous nous entendions, à ce que les chefs travaillent en équipe, à ce que nous remettions sur pieds la grande famille libérale, radicale et démocrate-chrétienne. Et puis, enfin, pourquoi craindre ce qui n’est en définitive qu’un retour à la normale de notre vie partisane :
- Un parti de droite l’UMP, héritier du RPR et du RPF ;
- le parti socialiste toujours prisonnier de ses contradictions et de ses vieilles lunes ;
-  et nous, la grande famille centriste, héritière de Tocqueville, d’Alain, de Mounier et de Marc Sangnier. Les républicains et les humanistes de toujours.   

Tout cela n’a rien d’une révolution.
Votre retour à l’indépendance, c’est seulement une OPA qui a mal tourné. C’est tout simplement le fleuve qui est retourné dans son lit. Je vous l’ai dit tout à l’heure je sais que ce n’était pas facile de quitter l’UMP. De ce point de vue là c’est une difficulté que nous nous n’avions pas, c’est vrai au Nouveau Centre.
Et je le répète chacun le fera à son rythme et je respecte le rythme de chacun.
Il n’est pas question de forcer qui que soit. Il n’y a pas de date de péremption inscrite dans le contrat. En même temps, mais ce n’est que mon opinion, je pense que nous avons tout à gagner à clarifier assez vite notre situation, notamment par la constitution d’un groupe parlementaire commun à l’automne.
Ne soyons pas comme ces commerces qui continuent encore aujourd’hui à afficher les prix en Francs et en euros. On croit aider les clients mais au bout du compte plus personne n’y comprend rien. 
J’ai repensé cette semaine à ce que nous disait l’autre jour, de manière très brillante comme toujours, Hervé de Charette. Il appelait au sein de la future confédération à une grande liberté et il a raison bien sûr, car personne n’a envie d’être caporalisée mais néanmoins je crois qu’il nous faudra trouver un équilibre entre l’individuel et le collectif.
Beaucoup d’entre nous sommes passés par l’UDF.
Mais à la fin, l’UDF était devenue une vraie tour de Babel, oserais-je même dire un joyeux bordel où chacun parlait une langue qui devenait de plus en plus étrangère à l’autre et où chacun s’évertuait même à la parler le plus souvent possible ! Mieux encore, on cultivait tellement nos identités respectives qu’on ne voyait pas que notre maison commune était en train de se fissurer de tous les côtés. Au point qu’on a foutu la maison par terre !
Dans les mois à venir, il nous faudra éviter cela à tout prix.  La liberté oui, car elle nous est consubstantielle ; mais la solidarité et l’esprit de responsabilité plus encore.
Gardez toujours en tête que tous ceux qui nous cherchent du bien – et ils sont nombreux – vont poursuivre trois objectifs en permanence :
- Le premier sera de marteler que nous ne représentons pas le Centre et que François Bayrou, lui, le représente.
- Le deuxième, c’est de faire la démonstration que nous ne représentons rien de sérieux.
- Le troisième, c’est de chercher en permanence à nous diviser, surtout Jean-Louis et moi.
Et bien je vous le dis, vous ne me trouverez jamais sur ce chemin-là. Vous ne me trouverez jamais sur le chemin de la division ; jamais sur le chemin du combat personnel.
Je vous le dis clairement : je ne veux qu’une chose : que nous soyons assez unis pour porter une alternative ; assez forts pour que cette alternative soit crédible ; assez soudés pour que nous puissions gagner.
Mes Chers amis,
Nous n’avons pas vocation à être d’éternels strapontins.
Nous n’avons pas vocation à être d’éternels supplétifs.
Nous n’avons pas vocation à être l’alibi d’un pouvoir concentré dans les mains d’un homme ou d’un parti.
Et je vais vous faire une confidence : j’en ai marre, à bientôt 50 ans, de n’avoir jamais voté au premier tour pour le candidat qui ait gagné la présidentielle.
Oui je veux construire avec vous une force politique qui soit vraiment porteuse de nos valeurs humanistes, républicaines et libérales ; une force qui donne aux jeunes l’envie de s’engager et de se dépasser.
On dit qu’il n’y a plus beaucoup de jeunes dans les réunions politiques. Mais qu’est ce que les partis donnent aux jeunes comme raison de venir et de s’engager ?
Un jeune ça marche aux valeurs et à l’éthique, pas à l’opportunisme et aux calculs ; ça marche à la justice pas aux inégalités ; ça marche à la générosité pas à l’affrontement ; ça  tend la main aux autres peuples ça ne ferme pas les frontières ; ça voit l’avenir et pas seulement le quotidien.
Oui, je voudrais que notre confédération ré-intéresse les jeunes, car si elle ré-intéresse les jeunes c’est qu’elle aura touché le cœur de tous les Français.
Je voudrais que notre futur parti porte un idéal de société et qu’il ne soit pas simplement une machine à se répartir des postes et des honneurs, qu’il apporte un supplément d’âmes plutôt qu’une addition d’égoïsmes.
Je voudrais qu’il sache affronter le quotidien mais qu’il sache aussi ne pas s’y enliser. Je voudrais qu’il parle aux Français mais qu’il sache aussi parler au monde et dire aux Français qu’il faut regarder le monde tel qu’il est.
En fait, ce portrait c’est aussi pour moi celui de notre candidat à l’élection présidentielle. Nous avons un double devoir devant nous, celui de se rassembler mais de manière concomitante celui d’avoir notre propre candidat à l’élection présidentielle.
Cette candidature, je ne la vois certainement pas comme une simple candidature de témoignage. Je la vois comme une vraie candidature alternative. Et je vous le dis comme je l’ai dit la semaine dernière au Nouveau Centre : je ne serai pas d’une confédération qui renonce à présenter un candidat à l’élection présidentielle ou qui serait aux ordres.
 J’ai lu comme vous que nous devrions nous retirer, que le risque d’un 21 avril à l’envers était trop fort, que nous devrions nous sacrifier sur l’autel de l’union.
Mais je vous le dis solennellement, mes chers amis : si le seul moyen pour passer le 1er tour, c’est un candidat UMP unique pour la majorité, cela veut dire une chose très simple : c’est que nous avons déjà perdu. Et quand on nous dit que la division fait perdre, c’est une contre-vérité historique.
Semaine après semaine, la candidature centriste est devenue une hypothèse puis aujourd’hui une évidence et bientôt chez beaucoup une formidable espérance. Qui aurait pensé cela il y a encore quelques mois alors que nous n’avions comme destin,  comme aurait dit Georges Bidault du temps du MRP, que celui du «  froment broyé entre deux meules » ? 
Avoir un candidat centriste devient une évidence pas seulement parce que toute l’histoire de la Ve République est l’histoire de cette offre plurielle au premier tour mais parce que qui mieux qu’un centriste peut aujourd’hui répondre aux problèmes que se posent nos concitoyens ?
Qui mieux que les partis des pères fondateurs de l’Europe, des pères fondateurs de la laïcité, des pères fondateurs de l’économie sociale de marché peuvent répondre aux grandes questions qui se posent aujourd’hui ?
- Sur la capacité de l’Europe à peser sur les affaires du monde grâce à une Europe fédérale ;
-  sur la capacité de notre modèle républicain à intégrer ceux qui savent que le bleu, le blanc et le rouge ne sont pas seulement les couleurs du drapeau américain mais aussi celle du drapeau français ;
- sur la capacité de notre capitalisme à recréer une espérance de progrès social pour chacun. 

Mes Chers amis,
Pour conclure,  je voudrais vous dire une nouvelle fois mon bonheur de nous voir à nouveau réunis grâce à cette confédération.
Mais maintenant, je veux aussi vous dire que j’aspire à l’action.
Alain disait : « Qui délibère oublie de vouloir ». Et il avait raison.
Il était important d’acter et de structurer notre rassemblement. Nous l’avons fait mais ce n’est pas l’essentiel ; c’est désormais derrière nous.
Il faut maintenant des preuves de vie. Et nous avons douze mois pour les donner.
Douze mois pour transformer  ce contrat en une réalité.
Douze mois pour transformer cette réalité en espérance.
Douze mois pour transformer cette espérance en une victoire de nos idées et de notre candidat.

Je vous remercie.

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